Un site de rêve, une source de discorde
Depuis les premiers relevés hydrographiques de la rivière Hamilton (Churchill), au milieu des années 20, on sait que ce fleuve réunit toutes les conditions idéales pour l’aménagement d’une puissante centrale hydroélectrique. Le débit d’eau est considérable. La dénivellation est impressionnante ; elle atteint 320 mètres sur les 30 derniers kilomètres de son parcours, soit la hauteur de la tour Eiffel, à Paris, ou de l’Empire State Building, à New York. La dernière marche de cette chute fait 75 mètres, ce qui représente une fois et demie la hauteur des chutes du Niagara. Enfin, on trouve partout sur le territoire du roc solide pour y asseoir les ouvrages de retenue et la centrale.
La centrale produit à peine ses premiers kilowattheures (1971) que, déjà, Terre-Neuve conteste la validité du contrat qui lie la Churchill Falls (Labrador) Corporation [CF(L)Co] (Newfoundland and Labrador Hydro à compter de 1974) à Hydro-Québec jusqu’en 2041. C’est le début d’une saga judiciaire qui se déroule devant les tribunaux de Terre-Neuve et du Québec et jusque devant la Cour suprême du Canada qui, dans un jugement unanime, tranche le débat de façon définitive en 1984. Elle déclare inconstitutionnelle la Reversion Act, une loi en vertu de laquelle le gouvernement de Terre-Neuve tentait de révoquer les droits de la CF(L)Co sur le fleuve Churchill et de transférer à la province la propriété des ouvrages hydroélectriques.