Le peuple de la quartzite

La surface satinée du quartzite reflète une couleur située entre le mauve soutenu et le rose, teintée de gris. Ces nuances sont attribuables à la présence de fer dans le minerai. Un peuple a préféré cette pierre, dont le nom scientifique est quartzite fin ferrugineux, aux autres dans le façonnement des outils de son quotidien pour la chasse, le travail des peaux et l’alimentation. Il s’est établi en rive droite d’un bras d’eau qui contourne une île, au pied d’une terrasse dominant les eaux vives de la rivière.

À l’aube du Ier millénaire de notre ère, les familles du « peuple du quartzite » se sont arrêtées le long de la route qu’elles suivaient vers les lacs et les forêts du nord du Québec. Elles emportaient dans leurs bagages des pierres extraites loin au nord-est, dans l’étroite bande de terre de la fosse du Labrador. Elles ont rejoint la rivière Romaine, puis voyagé vers le sud. Pour la fabrication de ses outils et munitions, ce peuple a utilisé le quartzite, dont les qualités de dureté répondaient à ses besoins.

Objets en quartzite ferrugineux provenant du site ElCw-008.

Un endroit abrité pour travailler la pierre

Le site ElCw-008 a été découvert en 2004 par une équipe d’archéologues dans le cadre d’un inventaire. Les analyses sur le terrain ont mis en relief l’intérêt des occupants pour cette pierre aux beaux reflets, qu’ils adoptent pour la fabrication des outils et d’accessoires de chasse. On a trouvé du quartzite dans d’autres sites de la Romaine, ce qui indique que l’ensemble du bassin de la rivière faisait partie de leur domaine. Ces gens ont aussi utilisé, dans une moindre mesure, un quartzite plus grisâtre. Outre leur intérêt pour le quartzite, ils ont choisi ce lieu d’arrêt pour ses qualités d’hospitalité.

Fouille du site du peuple du quartzite (ElCw-008) / Vue aérienne du site occupé par le peuple de la quartzite (site ElCw-008) sur la Romaine.

Le site se trouve en rive droite de la rivière Romaine (PK 285), en amont d’un grand méandre où se jette la rivière aux Sauterelles. Le débit de la rivière est légèrement plus fort en amont et plus faible en aval. L’emplacement est donc situé dans un tronçon à débit moyen du cours d’eau où la navigation est aisée. Face au site, un îlet offre une protection contre les vents et crée une voie navigable de faible courant.

Les gens qui ont travaillé le quartzite ont sans doute été attirés par l’aspect des lieux, caractérisés par la présence d’une île devant et d’une terrasse derrière. Ils ont dû apprécier la facilité d’accès à la rivière et à ses ressources. De plus, la rive forme une pointe à cet endroit ; cette bande de terre plate qui avance dans la rivière facilite l’aménagement des campements, sans nuire à la visibilité vers le nord et le sud depuis la terrasse supérieure. Autre atout des lieux, les nombreux tributaires de la Romaine situés à proximité donnent accès à d’autres bassins versants riches en ressources fauniques. L’endroit présente ainsi plusieurs avantages qui, à cette époque ancienne, rendaient les séjours productifs.

L’explorateur Albert Peter Low, à la fin du XIXe siècle, mentionne que les Innus qui fréquentent le bassin supérieur de la rivière Romaine évoquent l’abondance d’anguilles et de ouananiches. L’explorateur indique aussi que la lotte de la Romaine s’avère essentielle à la survie des Amérindiens l’hiver. Ce poisson est commun dans les lacs profonds de ce secteur.

Un paysage grandiose, une nature généreuse

Les familles qui se sont arrêtées à cet endroit ont principalement consacré leur temps à la chasse et au traitement des peaux. Le site choisi offre un abri confortable, le voisinage de forêts giboyeuses et un généreux havre de pêche. À proximité, quelques petits lacs parsèment la plaine, dont le lac Uauahk, le plus grand d’entre eux. Au cours des siècles, l’hospitalité du site a fait en sorte qu’on l’a choisi pour une halte ou une installation temporaire, le temps de la fabrication de quelques outils et du traitement des peaux issues des chasses dans les environs.

La chasse

Le matériel archéologique recueilli au site ElCw-008 servait davantage à la chasse qu’aux autres activités quotidiennes. Les familles y faisaient halte pour chasser, remplacer des outils ou réparer des flèches brisées. Dans leurs déplacements, elles n’ont emporté que les pièces terminées et ont laissé sur place les ébauches d’outils ou de pointes.

Quelques traces d’activités

Les occupants des lieux ont préparé un outillage à l’aide d’un quartzite teinté de gris, visiblement en vue de la chasse. Pour une raison inconnue, une partie de ces outils ont été abandonnés sur place après avoir été utilisés. Ces gens ont aussi aménagé deux structures de combustion cerclées de nombreux galets, que le temps et la nature ont désarticulés. Certains de ces galets ont été utilisés pour le broyage.

Ébauche bifaciale (ElCw-008 T-1366).
Outil d’appoint (ElCw-008 T-1364).
Pointe de projectile asymétrique et unifaciale (ElCw-008 T-1683).
Pointe de projectile asymétrique ou ébauche de pointe (ElCw-008 T-000).
Pointe de projectile ou ébauche de pointe (ElCw-008 T-000).